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En réaction au reportage « Wellness »

En réaction au reportage « Wellness »
Édito 45
Delphine HENRIET
Delphine HENRIET

Le bien-être, un « maux » féminin ?

6 Décembre 2011
J’ai regardé récemment le reportage « Wellness », consacré au bien-être et diffusé sur Arte (mardi 22 novembre 2011). Si le tour du monde des spas... donnait une image relativement fidèle, même si incomplète, du marché et des tendances, j’ai été surprise par la tonalité à charge d’une partie du documentaire. Les propos tenus par les professionnels interviewés étaient extrêmes, en assimilant bien-être à drogue, prostitution et cache-misère d’un mal-être profond. Voilà le tableau en trois mots et non des moindres !
Vous comprendrez, qu'il m'était impossible de ne pas réagir.

Avant d’expliquer mot à mot, les théories « partisanes » défendues par les intervenants, je tiens, en préambule, à vous signaler qu’ils étaient tous des hommes, et médecins ou psychothérapeutes. Et ne me faites pas écrire ce que je n’ai pas envie d’écrire à savoir étroits d’esprit et défenseurs de leur domaine à tout prix, et avec une notion lointaine du prévenir plutôt que guérir sans parler de leur aversion vis-à-vis des médecines ou des pratiques « autres » que la leur, c'est à dire occidentale. J’ajouterai également que leurs exemples ne relataient que des cas féminins. Comme si le bien-être était un « maux » féminin... A contrario, les responsables des marques de wellness qui vantaient les vertus de composants rares, lointains et chers étaient presque toutes des femmes, et les sujets filmés en soin que des femmes. Ben voyons !

Le cadre étant posé, revenons aux trois mots précités.

Il est avéré que lors d’un soin apprécié (bain, massage, soin du visage...), le corps secrète de l’ocytocine. En effet, l’état de « bien-être » d’une personne en confiance se traduit par l’augmentation de sa production dont le rôle est crucial lors de l'accouchement, l'allaitement ou l'accouplement. D’où selon les « experts » interrogés dans le reportage, un risque de devenir addict à l’ocytocine et à rechercher les situations favorisant sa sécrétion. L’ocytocine est alors assimilée à une drogue, excusez-moi du peu. Si je poursuis dans ce sens, imaginez que vous soyez taxé(e) de drogué(e) alors que vous savourez un carré de chocolat avec votre thé ou votre café, après le déjeuner... Imaginez aussi que l’on vous tienne rigueur de rechercher les situations de plaisir, de plénitude... qu’elles soient partagées ou solitaires.

En fait, dans le reportage, l’attaque est plus sournoise : les soins qui procurent du bien-être ne sont remis en cause que lorsqu’ils sont tarifés et notamment lorsqu’ils le sont chèrement. D’où l’assimilation du bien-être à de la prostitution. Dans le même reportage, une marche en forêt, qui fait également théoriquement du bien n’est pas, elle, pointée du doigt. A la condition toutefois, qu’elle soit pleinement appréciée et que l’on ne s’y adonne pas « juste pour le raconter ensuite ». Quid alors du soin gratuit ? Toléré ou non ? Oui sûrement si vous l’effectuez dans le plus grand secret et que vous ne vous en vantez pas après... Subtil !

Quant au postulat selon lequel le bien-être serait le cache-misère d’un mal-être profond, là également les femmes sont en ligne de mire. Si effectivement certaines d’entre elles au foyer, entretenues ou rentières tournent en rond et raffolent de soins, de virée chez le coiffeur, s’adonnent aux massages en tout genre pour tuer l’ennui... profiter régulièrement d’un soin ne fait pas de nous des dépressives en puissance.

Mais comme je fais également la part des choses, je reconnais volontiers quelques propos fondés dans le reportage. Celui de mettre en exergue le diktat actuel de devoir prendre soin de soi à coup et coût de surenchère pour lutter contre le stress, le vieillissement... me paraît pertinent. Comme toute « consommation » d’ailleurs quand elle devient excessive voire névrotique. Il est vrai aussi que nous sommes tous dans le collimateur d’une pression sociale qui nous somme de faire de plus en plus d’efforts pour aller mieux ou bien et parfois même de l’afficher pour s’en justifier, le prouver. Le bien-être sans ou à moindre effort est jugé suspect.

Pour clore le débat et couper court aux allégations précitées et « un tantinet » machistes, j’ajouterai enfin que femme et homme, une nouvelle fois, ne fonctionnent pas de la même façon. Le tactile chez la femme est une seconde nature. Les exemples ne manquent pas : les écolières qui se tiennent la main, les soins qu’elles prodiguent à leur poupée, ceux qu’elles donneront ensuite à leur enfant, l’importance des préliminaires dans l’acte sexuel... J’en passe et des meilleurs. Donc oui, l’attention physique, le besoin d‘être enveloppée... sont plutôt féminins et les soins qu’ils soient gratuits, chers, courts, longs... font partie de nous. De la même façon, la performance physique, la pratique d’un sport... sont plutôt masculins. Permettez-moi ce raccourci...

Quant à la féminisation de la société et la place de l’homme, en particulier, sur fond de partage des tâches et de soins, elle nous promet bien des débats !

Rendez-vous la semaine pour un nouvel édito.